Les Hard Feelings est le nouveau groupe de John Schooley, ancien des Revelators (deux excellents LPs sur Crypt) et leur premier album sur Sympathy, "Fought Back and Lost", enregistré avec l'ami Mike Mariconda (Raunch Hands, Devil Dogs) est des plus convaincants. C'était suffisant pour me convaincre de poser quelques questions à John sur son nouveau groupe mais aussi par exemple ses concerts avec R.L. Burnside.

SDZ:  Quand as-tu formé les Hard Feelings? Comment as-tu rencontré les autres membres du groupe? Je pensais que les Revelators, ton ancien groupe était du Missouri mais maintenant tu es à Austin, Texas?

JS: Les Revelators étaient du Missouri. Après le split du groupe, j'ai déménagé à Austin. Les Hard Feelings se sont formés en 1999, peu de temps après mon arrivée ici. Mariconda m'a présenté Andy et on a rencontré Trez car il jouait avec d'autres groupes répétant dans notre local. Puis Andy est parti cet été et on a un nouveau bassiste, Will Glenn.

SDZ: Quels tes principales influences musicales et non musicales?

JS: Blues, country, r&b, rock'n'roll, des trucs roots - cajun et bluegrass - , jazz, punk, rockabilly. Je ne fais pas de distinctions selon les genres, c'est juste j'aime ou j'aime pas.

Influences non-musicales? J'aime lire, autant des romans que affaires plus pulp, de Jim Thomson à Tchekhov. J'aime le cinéma et particulièrement les films noirs mais aussi d'autres genres tant que le film est bon. Je suis attiré par tous les films assez noirs et violents pour je ne sais quelle raison. J'aime aussi la pizza, le steak, le poulet frit et la bière.

SDZ: Est-il difficile d'obtenir un son dans lequel on peut à la fois entendre les racines de la musique américaine et un rock'n'roll plus contemporain au même moment?

JS: Pour moi c'est facile! Je ne fais que combiner ce qui m'interesse dans la musique. J'aimerais que plus de groupes fassent de même. J'écoute la musique de la même façon que ce soit un vieil artiste de blues ou un nouveau groupe punk: ça doit avoir une puissance soul, une crudité, une force de personnalité. Je ne sépare rien selon l'âge. Charley Patton et les Stooges ne sont pas de mon époque mais j'apprécie les deux. Beaucoup de gens ne s'interessent pas à ce qui n'est pas de leur génération et manquent ainsi beaucoup de bons trucs.

SDZ: Trouves-tu que les groupes rock du Texas sont catégorisés trop rapidement?

JS: Parfois. Quelqu'un comme Doug Sham a toujours été un problème pour les critiques rock car on ne pouvait pas l'enfermer dans un style. Il utilisait dans sa musique des éléments de blues, de country, de western swing, de rock'n'roll, de cojunto et beaucoup d'autres trucs. Cela avait tendance à apporter la confusion chez la plupart des critiques rock alors qu'il ne faut rien séparer! Doug Sham jouait ce qu'il aimmait, c'est aussi simple que ça.

Un gros problème vient du fait que beaucoup de gens (et particulièrement les "critiques rock") ont vraiment une connaissance limitée de la musique et compare les nouveaux groupes à d'autres qu'ils connaissent déjà. Il y a des gens qui ont comparé mon jeu de guitare à George Thorogood (en considérant ça comme un compliment je suppose) et je pense "Hound Dog Taylor? Bukka White?". Mais ils n'ont jamais entendu ceux-là donc ils ne peuvent pas en parler. Donc la plupart du temps quand les gens mettent une étiquette sur un groupe, ils n'ont vraiment pas idée de quoi ils parlent!

Je ne pense pas qu'il y ait un son spécifique pour les groupes rock du Texas. Je veux dire les Hard Feelings sont un groupe du Texas tout comme Pantera. C'est juste qu'il y en a un qui fait de la merde et pas l'autre!

SDZ: Comment es-tu rentré en contact avec Walter Daniels? Qu'a t-il apporté à votre musique?

J'aimais beaucoup Jack O'Fire et je l'ai contacté pour faire quelque chose avec les Revelators. C'est un type vraiment sympa, il a joué sur un des 45t des Revelators sur Sympathy. Quand les Revelators se sont séparés, Mariconda et lui étaient les seules personnes que je connaissais à Austin quand j'ai déménagé là-bas et ils m'ont beaucoup aidé. J'adore jouer avec lui, c'est un harmoniciste génial. Il joue avec nous de temps en temps, on fait des spectacles en ville et on passe toujours un bon moment. Il ajoute des éléments chaotique et bruitiste et j'adore la façon dont il joue avec le feedback. Avec lui on est bien meilleur que quand il n'y a que nous.

SDZ: Comme c'était de travailler avec Mike Mariconda?

Super. Mike m'a beaucoup aidé à déménager ici et on est devenu bons amis. Quand Andy est parti, Mike a joué de la basse pour nous à quelques concerts avant qu'on trouve Will. Je n'avais jamais vu Mike jouer live avant, juste quelques vidéos des Raunch Hands, et c'était assez incroyable de l'avoir sur scène à côté de moi. Il a appris toutes les chansons en quelques jours et avec une seule répétition. Il est vraiment à l'aise sur scène. J'ai vu les Raunch Hands au Vegas Shakedown et c'est assez cool de penser que Mariconda a joué de la basse dans mon groupe car c'est vraiment un guitariste killer!

J'aime aussi la façon dont il ne niaise pas en studio, il n'essaye pas de flatter les égos. Si ça sonne mal, il te le dit et tu finis par t'améliorer à cause de son honnêteté. Et il a beaucoup d'idées pour le son et beaucoup d'autres trucs. Il est bon pour trouver différents sons mais garder une cohérence générale pour que ça reste l'oeuvre d'un même groupe.

 

SDZ: C'est vrai que les chansons de votre premier LP "Fought back and lost" sont très variées. En est-il de même pendant vos concerts? Sur scène préférez-vous l'énergie au son ou cherchez-vous les deux?

JS: Je suis vraiment fier que sur l'album toutes les chansons  soient un peu différentes. En live on essaye de faire de même en étant varié, tout en restant nous même. C'est pourquoi je voulais faire une reprise de "Girl on my mind" (ndr: de Buddy Holly). Je voulais ralentir un peu le tempo pour un moment au lieu de toujours vouloir faire plus dur et plus vite. Quand on enregistrait Mariconda disait "J'espère que les gens sont prêts pour un disque où toutes les chansons ne sonnent pas pareil!". Parce que beaucoup de groupes Crypt, Nine Pound Hammer, les New Bomb Turks, les Revelators, les chansons étaient assez similaires. J'aime les Turks et Nine Pound Hammer mais nous voulions vraiment nous éloigner de cette sorte d'uniformité.

Live avec les Hard Feelings, si je n'ai pas envie de faire le meneur sauvage et fou, on peut juste relaxer et juste faire un show bien "tight". J'ai l'impression que nos chansons sont assez bonnes pour qu'en ne faisant que les jouer bien on fasse un bon show. Et si on est tous bourrés, ça peut devenir fou comme un grand cirque et c'est marrant aussi. En tournée on aime justement alterner les shows de malades complètement ivres avec les shows bien tight pour garder cette variété. Et dans les meilleurs soirs c'est tout à la fois. On pète les plombs mais on fout pas trop la merde et tout le monde passe un bon moment.

 

SDZ: Tu peux nous parler de John Schooley and His One Man Band? Tu as sorti un 45t sur Goner il y a quelques années mais on dirait qu'il y a un nouveau disque...c'est un 45t ou un album?

JS: Il y a un nouveau 45T sur Ball Records qui vient de sortir. Willie de Ball m'a contacté parce qu'il était un grand fan du disque sur Goner et voulait sortir un 45t. Je ne pensais vraiment pas que quelqu'un se souvenait de ce disque mais peut-être était-il vénéré par quelques-uns. Le nouveau 7' comprend deux originaux et non deux reprises et je pense qu'il est assi bon que celui sur Goner. Il en a pressé 500 et je pense que les seuls endroits où on peut le trouver c'est à Austin ou à Gardiner dans le Maine.

SDZ: Est-ce que vous faites beaucoup de concerts avec les Hard Feelings? Y a t-il des projets de tournées?

JS: D'habitude on joue une ou deux fois par mois. On a fait notre première tournée en Août et on va en refaire en Janvier avec les Lazy Cowgirls et en Avril avec les Deadly Snakes. On va enregistrer un 45t pour Sympathy et pour Dropkick (le label des Onyas) ce mois-ci. Avec un peu de chance une tournée européenne et un deuxième album l'année prochaine.

SDZ: J'ai lu que tu avais joué avec le légendaire RL Burnside, comment était-ce?

JS: C'était formidable car je suis un fan de R.L depuis longtemps. Il y a quelques années j'ai travaillé avec l'agence de booking qui trouvent des dates pour les groupes de Fat Possum et je me souviens être allé à un festival de blues  pour voir R.L. et j'étais tellement excité d'aller backstage pour prendre une photo avec lui. Et maintenant jouer avec lui? Je ne pensais vraiment pas que ça allait arriver un jour.

En tournée le public était comme un mélange bizarre entre des vieux croutons de la Blues Society et des kids indie-rock qui avaient écouté "Ass Pocket of Whiskey". On a joué dans des bars blues pourris et dans des clubs punk rock. C'était sauvage. Et jouer avec R.L c'était tellement incroyable! Toutes les chansons sont vraiment simples et pendant tout le set je n'utilisais que deux tonalités: E et G. Mais quand tu tombes dans le groove, ça devient vraiment hypnotique et je pouvais jouer comme ça toute la nuit.

J'ai eu ce plan parce que Kenny Brown, le blanc habituel qui joue avec R.L, venait de se faire retirer son permis pour conduite en état d'ivresse. Il ne pouvait pas conduire le van et ils avaient donc besoin d'un tour manager. R.L ne se faisait pas assez pour payer Kenny en plus d'un chauffeur et ils leur fallait donc quelqu'un pour jouer et pour conduire. Les Revelators avaient joué quelques concerts avec les Neckbones et ce sont eux qui ont parlé de nous. Ainsi on a fait une tournée de la côte ouesr er je suis allé en Europe pour jouer à quelques festival blues là bas. T-Model Ford et Spam étaient avec nous pour la tournée US et ce sont de sacrés numéros à eux tout seuls...

J'étais supposé repartir sur la route avec RL, pas pour jouer mais juste pour conduire. Mais Kenny a eu peur (je n'invente pas c'est véridique) que je lui vole sa place ("steal his licks") et n'acceptait pas de partir en tournée si c'était moi le chauffeur! Il a laissé des putains de messages menaçants sur mon répondeur et tout! J'ai trouvé tout ça très drôle sauf que je n'avais pas de blé et quand je jouais avec RL c'est bien les seules fois que je me suis fais de l'argent en jouant de la guitare! Mais je suppose qu'il se sentait menacer de perdre sa place et n'avais pas beaucoup d'autres qualités pour trouver un autre boulot si ça arrivait...

Quelqu'un a filmé un des concerts que j'ai fait avec R.L en Europe et le gars ne m'a jamais envoyé une copie! Si jamais vous entendez parler d'une K7 de RL avec un "guitariste inconnu", envoyez-moi une copie!

SDZ: As-tu quelque chose à rajouter? Des groupes à recommender? Des endroits à voir au Texas?

JS: Des nouveaux groupes que je recommande: les Deadly Snakes et les Soledad Brothers.

Au Texas, allez juste à Austin, évitez le reste. Mangez un hamburger chez Casino's, un taco chez Maria's Taco Express et du poulet chez Roy Henry's. Allez chez Sound Exchange, Waterloo, Antones et 33 Degrees  pour les disques. Et rencontrez ma copine Anna qui roque! On s'est rencontré parce qu'elle avait une copie de "Satan is Real Again" des Country Teasers et je voulais l'écouter. Elle joue dans un groupe qui s'appelle The Regrettes et ils sont comme les Detroit Cobras sauf que ce sont toutes des filles!

Site Web des Hard Feelings